Épiphanie Chromatique
par Mathieu Lussier
C’est arrivé encore aujourd’hui. Ce n’est vraiment pas la première fois que ça arrive. Certainement pas la dernière. Ça fonctionne à tous les coups.
Pourtant…je ne suis pas croyant, je fonde mes convictions personnelles sur les avancées de la science et ce phénomène, je le reconnais, se rapproche très certainement plus des croyances Jedi que des travaux d’Einstein….
Je joue du basson depuis 35 ans. Depuis maintenant environ 15 ans (touchons du bois), j’ai l’impression d’avoir trouvé une façon de faire mes anches relativement simple, constante et fiable, me permettant de ne pas constamment vivre dans une paranoïa à l’approche d’un concert ou d’un enregistrement.
C’est donc arrivé aujourd’hui. Après avoir échoué dans le grattage consécutif de deux anches j’ai appliqué le traitement choc : changer la couleur du fil d’anche utilisé!
Après une longue et merveilleuse séquence, mon magnifique fil bleuté a dû céder (temporairement je l’espère) la place à ma bobine de fil blanc.
Ça se manifeste comme une voix intérieure, un fort appel, une conviction. C’était la chose à faire et, encore une fois, cela a fonctionné.
Est-ce que le fil blanc fonctionne toujours ? non, évidemment. Il m’est arrivé le contraire, de passer du blanc au bleu, du rouge au blanc, du rouge au bleu, en passant par le noir, le vert, le rose, le jaune…
Certaines couleurs, magnifiques, ne fonctionnent simplement jamais. Pourquoi? Difficile à dire…Certaines couleurs, comme le rouge, font généralement consensus. D’autres, comme le vert, polarisent…Pourquoi? Impossible à discuter ouvertement sans risquer l’internement.
C’est un phénomène qui me fascine. La seule conviction « paranormale » que j’assume complètement, si on laisse de côté ma fascination pour la famille royale britannique.
J’ai cependant la certitude que je ne suis pas seul à croire aux pouvoirs des différentes couleurs du fil de nos anches. Étant grand fan de la saga Star Wars, tel qu’évoqué plus haut, je me console en me disant que ce phénomène me rapproche un peu des pouvoirs des disciplines de Yoda.
Si j’ai longuement hésité à formuler cette conviction ouvertement, craignant pour ma réputation, cette dernière aurait certainement souffert à plusieurs reprises tant sont nombreux les souvenirs d’impasses terriblement angoissantes à la veille de concerts importants ou d’enregistrements de disques lors desquelles un changement de couleur de fil a tout changé.
Oscar Wilde a dit : « Les folies sont les seules choses qu’on ne regrette jamais ». C’est donc sans regret et sans honte que j’assume ce brin de folie en espérant que cette conviction, mais surtout ce pouvoir magique, ne s’estompe jamais d’ici la fin de ma carrière.